[RP] L'ingénierie au bout du doigt

J'arrive à l'auberge de Sombrevallon aux petites heures du matin avec mon équipement de départ pour mon projet.  

J'approche l'aubergiste avec une expression amicale en tentant de camoufler mon euphorie.

- Ishnu alah mon cher, j'aurais besoin d'une chambre, préférablement à l'écart pour éviter de déranger les autres occupants, dis-je enjoué.

- Ishnu alah voyageur, ce sera deux pièces d'ar- Euh, pardonnez mon indiscrétion, mais pourqu-, dit-il avant d'être interrompu.

- J'ai besoin d'espace pour expérimenter sur une théorie. Je vais essayer d'être silencieux, mais je ne peux rien promettre. Je peux cependant promettre de ne pas endommager les lieux et nettoyer après mon passage.

- Je vois... Deux pièces d'argent, voyageur. Vous pouvez prendre la pièce située sur la branche au troisième étage.

- Voilà, merci, dis-je en déposant la somme sur le bureau.

Je me dirige alors vers la chambre en question, mais avant d'ascendre la rampe, je me retourne vers mon hôte.

- Une dernière chose, si vous entendez des cris, prière de les ignorer, ça arrêtera sous peu, dis-je avec un sourire.

L'aubergiste me démissionne d'un faible signe de main et une expression légèrement confus voire peut-être même troublé.

Une fois dans mes quartiers provisoires, je dépose mon sac sur la table de chevet en m'asseyant sur le lit.

Je place ensuite une bâche sur mes genoux et sort mes outils: un couteau, une pince, des bandages, des câbles et, le plus important, des copeaux de mithril froid.

- Bon, c'est parti, dis-je avec un peu d'hésitation.

Je prends le couteau, plante ce dernier tout juste au dessus de la phalangette supérieur de mon index gauche et performe une incision verticale en direction de l'ongle.

Je me saisis d'un bout de tissu que je place entre mes dents et le mord solidement.

- H'est harhi...

Je courbe la pointe de la lame sous la base de l'ongle de l'intérieur de la plaie et j'utilise l'os comme levier et...

- HHHHHHHHHHHHHHHMPHHHHHHHHHHH!

L'ongle s'éjecte de ma chair et tombe sur la bâche.

Je laisse tomber le morceau de tissue, permettant à ma mâchoire de relaxer un peu.

- Oufff... Ish... Et maintenant...

J'utilise la pince pour me saisir d'un copeau de mithril froid et l'insert à la place de l'ongle.

Celui-ci glisse agréablement en place, me donnant un étrange frisson.

Je saisis ensuite un câble, le connecte au morceau de métal et le place dans l'incision, laissant l'extrémité exposée au niveau de la phalange avant d'appliquer un bandage.

- Ouff...  Ouff... Plus que neuf à aller.

Quelques instants plus tard, au rez-de-chaussée, un nouvel arrivant se présente devant l’aubergiste.

-  Ishnu alah mon frère, je me nomme Arthé-

HHHHHHHHHHHHMPHHHHHHH!

Mais ce dernier fut soudainement interrompu par un cris provenant à l’étage.

- ...
- Je suis ici pour-

HHHHHMMMMMMMMMMMMPHHHHH!

Le singulier individu s'interrompt une seconde fois, la bouche entrouverte, un sentiment troublé venant chasser sa quiétude du moment.

- Venir en aide aux jeunes troupes, je suis guéri-

HHRRRGAAAAAAAAAAAHHHHHH!

- ...
- Veuillez m’excuser un moment.
- Troisième étage, faites-vite... répondit l'augergiste visiblement inquièt.

Deux cris de douleur plus tard, le jeune néophyte s’arrête, pétrifié.

La terreur s’installe un moment sur son faciès alors qu’il scrute un instant le sol.

Du sang, des résidus d’ongles...

- Que…

Et l’origine des cris assit sur le lit, les mains mutilées.

- …

- Plus que deux, dis-je, exténué, en me retournant vers l'entrée; des rives de larmes et de sueurs coulent, homogènement, sur mon visage.

Un kaldorei se tient au seuil de la chambre avec un air... alarmé, je crois. Son regard traine le sol.

- Oh, ne vous en faites pas, j'avais prévu une bâche, mais ceux du pouce tendent à être profond et je- aiee- je ne suis pas tout à fait adroit en ce moment, dis-je en lui montrant ma main gauche pleine de bandages avec des ongles en mithril luisants.

- Je vous assure que je vais nettoyer une fois que j'ai fini et- ishh- après une courte convalescence.

Après un moment d’hésitation qui lui paru une éternité, le jeune initié s’approche avec précaution, tentant bien que mal de camoufler son malaise grandissant face à la nature obscène de la situation présente.

- J’avoue avoir du mal à comprendre…, dit-il d'un air sévère en approchant doucement sa main droite vers celle de gauche de son confrère.
- ...
- Mais cela semble douloureux... laissez-moi vous aider.

Il ferme les yeux et susurre une prière silencieuse.

Puis, une faible lueur dorée s'émane hors de la paume de sa main pour s'imisser dans les blessures.

- Oh attention, ce n'est pas-

Je m'interromps alors que la lumière engouffre les fruits de ma chirurgie, ne laissant pas la moindre cicatrice à l'exception d'un ongle artificielle en mithril et un bout de câble effiloché au niveau de la jointure.

J'étire mes doigts et je referme mon poing.

- Douloureux.

Je me retourne vers l'étrange kaldorei avec une expression embarrassé.

- J'ai une confession à vous faire... j'ai dépensé mes deux dernières pièces d'argent sur cette chambre et je n'ai pas de quoi vous offrir un pourboire.

- Ne pas recommencer ce genre de pratique serait-

Il s'interrompt brusquement et agrippe son torse comme s'il avait un soudain haut le cœur.

- Désolé, l'ami, mais il m'en reste encore deux à-

Je m'interromps alors que le kaldorei se recroqueville sur lui-même en douleur et, avec un air concerné, agrippe son épaule pour le maintenir.

- Un problème?

Le jeune néophyte se mit à tousser violemment.

Puis, après quelques respirations haletantes, comme s'il venait tout juste de courir un marathon, l’elfe guérisseur reprit peu à peu ses esprits.

- Désolé, je suis nouvellement assigné ici. On m’a chargé de veiller au bien-être de nos jeunes troupes responsables de maintenir l’équilibre de la nature se montrant un peu trop agressive selon les derniers rapports.

Il marque une pause et se frotte un le front momentanément, semblant chercher ses mots.

- De... constater que vous êtes vous-même la cause de vos souffrances m’a un peu… ébranlé.

- Ouff! Pendant un instant, je pensais que tu souffrais de quelque chose de grave, dis-je enjoué avant de mordre dans un bout de tissu et porter mon couteau à la phalange de mon annulaire droit.

D'un mouvement agile, j'éjecte l'ongle d'un seul coup et le remplace par la version artificielle de mithril froid.

- Gnnhhh... Plus qu'un à aller. J'en conclus que tu ne travailles pas ici alors?

Ne pouvant plus contenir le choc, sa conscience le quitte et sa vision s’assombrit.

Sans comprendre ce qui lui arrive, son corps, grand et frêle, entame une chute vers l’arrière avant de s'écraser abruptement au sol.

- ………………................

- Il semblerait que j'ai sous-estimé la gravité de la situation, dis-je d'un ton agacé, HNGHN! Et dix!

Je referme la bâche sur mes genoux et nettoie les détritus de cette opération.

- Venir dans ma chambre, offrir son aide, faire des demandes. Il a du culot, vraiment, mais bon, il m'a sauvé une bonne semaine de convalescence avec ses manigances. Je devrais être reconnaissant, je n'ai pas une éternité devant moi... pour le moment...

Je repositionne le corps du jeune Kaldorei sur le lit de façon plus confortable, notamment en plaçant sa tête sur l'oreiller.

- Dommage qu'il a soigné la main gauche. Étant droitier, je risque d'être désavantagé pour un moment... ceci dit...

Je regarde ma main droite, une lueur écarlate perçant le blanc des bandages, puis je me retourne vers le néophyte.

- Il va probablement se réveiller avant que celle-ci ne guérisse... d'elle-même... Qui plus être, il a dit être envoyé... du temple d'Élune de Darnassus probablement. S'il tente de renter, par lui-même, il pourrait s'évanouir s'il se fait attaquer par un ours... ou piquer par une ronce. Ce serait irresponsable de le laisser à sa guise dans un tel état.

Je m'installe à son chevet.

- Ah! Booooooooooo... dis-je en maintenant la note.

Je me penche vers l'arrière et jète un bref regard vers la position de la lune.

Mes doigts s'enlacent, mettant en proéminence mes nouveaux ongles ; ma main gauche propre et celle de droite couverte de bandages.

- ...oooonne fin de matinée. Vous allez bien, très cher?

Il cligne les yeux en guise de réponse et se redresse.

Son attention se voit détourné par les bandages de son interlocuteur.

- Vous êtes encore blessé... dit-il en fronçant les sourcils.

- En fait, je suis Kynedriel Wintertide.

Je redresse ma main gauche autour de celle de droite et performe une révérence.

- Excusez mes manières, j'ai juste l'impression que le temps n'est pas une ressource en abondance... pour l'instant. Je tenais à  vous remercier pour ce que vous m'avez fait économisé.